Moustiques génétiquement modifiés réduisent le paludisme

Des moustiques génétiquement modifiés avec la technologie CRISPR montrent une réduction de 50% de la transmission du paludisme dans les essais sur le terrain. Le gène FREP1 modifié bloque le développement du parasite, offrant une solution durable.

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Percée dans la lutte contre le paludisme

Dans une avancée majeure pour la santé mondiale, des essais sur le terrain avec des moustiques génétiquement modifiés ont montré des réductions significatives de la transmission du paludisme. Des chercheurs utilisant la technologie CRISPR-Cas9 ont développé des moustiques résistants aux parasites du paludisme, offrant un nouvel espoir dans la lutte contre une maladie qui a tué environ 597 000 personnes en 2023, principalement des enfants de moins de cinq ans en Afrique subsaharienne.

La science derrière le succès

La percée se concentre sur la modification du gène FREP1 chez les moustiques Anopheles, les principaux vecteurs de transmission du paludisme. Des scientifiques d'institutions telles que UC San Diego, Johns Hopkins University et Imperial College London ont développé ce qu'ils appellent un système d'«entraînement génétique» qui remplace un seul acide aminé dans la protéine FREP1. Ce petit changement génétique - le remplacement de L224 par Q224 - empêche les parasites du paludisme d'atteindre les glandes salivaires des moustiques, bloquant ainsi efficacement la transmission aux humains.

Le Dr Anthony James, chercheur éminent dans le domaine, a expliqué : «Cela représente un changement de paradigme dans la lutte antivectorielle. Nous n'essayons pas d'éliminer les moustiques, mais de les transformer de vecteurs de maladie en alliés contre le paludisme.»

Résultats des essais sur le terrain

Des études de terrain récentes dans des environnements contrôlés ont montré des résultats remarquables. Les populations de moustiques avec l'allèle FREP1Q224 modifié ont montré des taux d'infection de seulement 30% contre 80% chez les moustiques normaux. Plus significativement, les moustiques infectés présentaient des parasites minimaux dans leurs glandes salivaires, empêchant ainsi une transmission efficace aux humains.

Le système d'entraînement génétique s'est avéré très efficace, propageant la propriété protectrice dans les populations de moustiques avec plus de 94% d'efficacité en 10 générations. «La vitesse à laquelle cette modification se propage dans les populations est sans précédent,» a noté le Dr Omar Akbari de UC San Diego.

Relever les défis de la résistance

Cette développement arrive à un moment critique car les méthodes traditionnelles de lutte contre le paludisme rencontrent des défis croissants. Les moustiques développent une résistance aux insecticides, tandis que les parasites du paludisme deviennent résistants aux antipaludéens. L'Organisation mondiale de la santé rapporte que la résistance aux insecticides a été détectée dans au moins 78 pays, entravant les efforts de lutte contre le paludisme par des moyens conventionnels.

Le Dr Flaminia Catteruccia de Harvard University a remarqué : «Nous manquons d'options avec les outils actuels. Les approches génétiques offrent une solution durable qui pourrait compléter les méthodes de contrôle existantes.»

Considérations éthiques et réglementaires

Malgré les résultats prometteurs, la technologie fait face à des obstacles éthiques et réglementaires importants. La suspension récente du projet d'entraînement génétique Target Malaria au Burkina Faso après une intervention gouvernementale souligne le paysage complexe pour les technologies de modification génétique dans les régions endémiques du paludisme.

Les groupes environnementaux ont exprimé des préoccupations concernant les conséquences écologiques potentielles. «Nous avons besoin d'évaluations approfondies des risques pour tout déploiement à grande échelle,» a averti le Dr Ricarda Steinbrecher de la Fédération des scientifiques allemands.

Perspectives futures

Les chercheurs soulignent que cette technologie doit faire partie d'une approche intégrée de lutte contre le paludisme, aux côtés des moustiquaires imprégnées d'insecticide, de la pulvérisation intradomiciliaire à effet rémanent et des antipaludéens. D'autres essais sur le terrain sont prévus pour 2026 dans des environnements soigneusement contrôlés pour évaluer les effets à long terme et la sécurité écologique.

La Fondation Gates, qui a largement investi dans la recherche sur le paludisme, considère cela comme un développement prometteur. «Bien que des défis subsistent, cela représente l'un des outils les plus prometteurs que nous ayons vus depuis des décennies pour une éventuelle élimination du paludisme,» a déclaré un porte-parole de la fondation.

Alors que la recherche se poursuit, la communauté mondiale de la santé surveille de près, espérant que les technologies génétiques pourront enfin offrir la percée nécessaire pour lutter contre une maladie qui a tourmenté l'humanité pendant des siècles.

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